Ma rencontre avec la danse de couple s’est produite en 2007 sans crier gare.
L’Université proposait des cours de salsa et j’ai suivi une amie qui souhaitait découvrir.
Les débuts ont été complexes, la salsa est très technique.

Au bout de quelques semaines, un déclic c’est produit.
J’ai eu une sensation nouvelle qui me donnait l’impression que tout se trouvait à la bonne place, je venais de découvrir une clé et un monde s’ouvrait à moi.

Je n’ai eu ce type de sensation que deux fois dans ma vie.
La première fois, c’est lorsque j’ai appris à lire. Les signes indéchiffrables que je voyais partout ont soudain été éclairés et ont pris tout leur sens.
Pour la danse de couple, ce fut similaire.
Lorsque j’ai compris et ressenti les principes de la connexion, tout est devenu fluide: je comprenais l’intention de l’autre et comment je devais me placer pour y répondre.

Le plus drôle, c’est qu’adolescente j’étais très complexée et incapable de danser en public.
Si j’avais su que je deviendrais passionnée de danse sociale, je n’y aurais pas cru !

Je venais d’intégrer une immense famille que je n’étais pas prête d’abandonner.
J’ai appris successivement la salsa cubaine, la salsa portoricaine, la bachata, la kizomba, le semba, le zouk brésilien…
Et je compte continuer à apprendre de nouvelles façons de danser tant que je le pourrai. La diversité est une richesse à mes yeux.

La danse m’a appris à mieux me connaître et m’accepter.
J’ai reçu une éducation pour être une femme indépendante. Or, nous sommes encore fortement imprégnés par un phénomène culturel, même s’il tend doucement à évoluer: l’homme endosse le rôle du meneur et la femme celui du suiveur.
Il s’avère que J’ADORE le rôle de suiveur. Il est très reposant et constitue un des rares moments où je peux m’autoriser à me laisser porter sans réfléchir.
J’ai dû déconstruire mes réflexes d’anticipation et c’était un réel travail pour moi qui suis une grande contrôlante.

Une fois l’automatisme des mouvements de base acquis, quelle découverte!
Je vivais chaque danse comme une promenade fantastique pendant laquelle je faisais la connaissance d’un ami qui me partageait son univers, me montrait ses chemins préférés, me racontait son histoire.
Tout ça sans la moindre parole.

Il y a des bases incontournables pour marcher musicalement à deux: le mouvement au rythme de la musique et le cadre de danse.
Sans cela, c’est un peu comme si le chemin était jonché de pierres ou de trous rendant la route impraticable, impossible d’admirer le paysage sereinement dans ces conditions.

Préalablement à la rencontre avec l’autre, une pratique personnelle est à effectuer: être attentif au rythme de la musique, l’ancrer en soi pour bouger son corps en fonction jusqu’à acquérir un automatisme et être stable sur ses appuis.

Le rythme de la musique est la route commune.
Sans respect du tempo, c’est comme si chaque danseur empruntait deux chemins parallèles sans se rencontrer.
Le cadre de danse est ce qui permet de communiquer son intention sur la route à emprunter.
Sans cela, les danseurs prendront un chemin différent à chaque bifurcation et se perdront de vue.

Le cadre de danse, ou la connexion, s’apprend et s’affine au contact de l’autre.
Chaque partenaire doit exercer une pression identique en continu sur la main de l’autre. Cette résistance permet à la danseuse de savoir quand le danseur relâche ou ajoute de l’énergie, et donc s’il faut avancer ou reculer pour rééquilibrer la connexion. On s’adapte à la force que met le partenaire et on garde les bras indissociables du corps pour propager le mouvement et bouger dans notre entièreté.
Les bras sont détendus mais toniques et réactifs car ils sont le vecteur des informations.

Cela ressemble étrangement à un dialogue n’est-ce pas?
La danse de couple est un dialogue sans parole et chacun y tient un rôle.
Le meneur guide pour permettre la transmission d’une intention claire, donne confiance en étant précis et stable.
Le suiveur fait confiance, écoute et décode les informations émises pour y répondre.

Selon les danses et à un certain niveau de maîtrise et d’évolution, les rôles peuvent s’inter-changer voire se confondre. Les initiatives se partagent, les propositions musicales s’interprètent et inspirent de nouvelles figures à l’autre.

L’acquisition des règles techniques est au service de la créativité.

Seul ou à deux, la danse engendre de nombreux bénéfices:

• Se vider la tête.
  Nous réintégrons pleinement notre corps, souvent délaissé en faveur de l’intellect. Notre corps bouge en étant concentré sur la musique, c’est un excellent moyen pour calmer nos préoccupations mentales et être dans l’instant.

• Se détendre et être plus spontané:
  La danse est une forme de jeu sur la musique qui permet d’être à l’aise avec notre corps. Elle fait appel à notre aspect enfantin qui a des réflexes naturels et des sensations en lien avec l’environnement. Les enfants dansent instinctivement sur la musique.
  Je tiens également beaucoup à véhiculer l’idée que la danse fait partie des moments de plus en plus rares où prendre quelqu’un dans ses bras est socialement accepté. Profitons-en car les câlins sont vitaux !

• Mieux communiquer:
  Pour nous exprimer, nous avons appris à accorder beaucoup d’importance à l’ostensible communication verbale.
  Pourtant, plus de 90% de notre communication serait non verbale !
  La danse de connexion est un outil pour en appréhender toutes les subtilités.

Pour moi, au delà d’une activité sociale et sportive, la danse est une attitude qui se cultive:
échange, ouverture d’esprit, respect de l’espace de l’autre, bien-être, innovation… Et j’en oublie sûrement bien d’autres !